Après quelques tensions sur les pratiques anti-concurrentielles d'Intel au Japon, AMD vient officiellement de déclarer la guerre au géant de Santa clara aujourd'hui. AMD a ainsi déposé une plainte anti-trust devant un tribunal américain, pour de présumées pratiques monopolistiques d'Intel au niveau mondial. AMD annonce avoir identifié 38 sociétés qui auraient bénéficiés d'avantages financiers pour favoriser les produits Intel plutôt que ceux de la concurrence.

AMD accuse ainsi Intel d'avoir payé de très larges sommes à Dell, Toshiba et Sony pour garder l'exclusivité auprès de ces compagnies. Toutefois, la majorité des réquisitions concernent surtout le bon vieux système des marges arrières (rebates) qui s'appliquent aussi au monde de l'informatique et qui n'a rien de nouveau. Coca-Cola peut faire la même chose pour éjecter Pepsi des linéaires d'Auchan. Bref, dans la longue liste d'accusation d'AMD, la grosse majorité traite de pratiques commerciales discutables, mais généralisées dans toutes grosse entreprise capitaliste.

Nous avons également lu le texte de la plainte (disponible ici) dans son intégralité. Celui-ci  (très intéressant et contenant un tas d'anecdotes mais particulièrement romancé, à l'américaine) comporte plusieurs points pseudo-techniques que nous allons commenter :

1. AMD commence à accuser Intel de pratiques monopolistiques dés le 80286, et persiste sur tous les CPUs suivants, en oubliant toutefois de rappeler qu'il a été lui-même condamné pour l'utilisation du microcode Intel reverse-engineeré au temps des 486.
   
   
2. AMD accuse Intel d'avoir voulu rendre la DDR3 "incompatible" avec les produits d'AMD, disposant d'un contrôleur mémoire embarqué. Les arguments avancés sont, pour l'heure, trop obscur pour qu'on puisse émettre un quelconque jugement.
   
   
3. AMD accuse aussi Intel d'avoir volontairement biaisé ses compilateurs pour défavoriser les CPUs AMD. Citation : "Intel designed its compilers, which translate software programs into machine-readable language, to degrade a program’s performance if operated on a computer powered by an AMD microprocessor." Accusation très grave, mais il semble toutefois étonnant qu'aucun developeur ne s'en soit rendu compte, tant la démonstration devrait être simple (une décompilation suffit). De plus, le compilateur Intel reste, à l'heure actuelle, le plus rapide de tous pour les CPUs... AMD ! Pire, AMD accuse Intel de détecter, via CPUID, la chaîne "AuthenticAMD" et de dégrader volontairement les performances, voire même de le crasher. Ceci semble plus tenir du fantasme qu'autre chose. En effet, il semble logique pour l'application de détecter le CPU afin de choisir un code-path adapté.

Quoiqu'il en soit, Intel va maintenant devoir répondre point par point à toutes ces accusations, et, vu les rumeurs de pratiques monopolistiques qui ne cessait d'enfler depuis ces deux dernières années, ce n'est pas une mauvaise chose : Il était temps qu’Intel s’explique une bonne fois pour toute. Toutefois, les avocats d'AMD risquent d'avoir fort à faire avec l'armée de juristes d'Intel qui ne va pas tarder à tirer à bout portant sur tout ce qui bouge. Autre problème, en accusant la majorité des grands constructeurs d'accepter les propositions présumées malhonnêtes d'Intel, AMD joue gros. Bref, qui a dit "Quitte ou double ?"...